Le haïku est un art poétique né au Japon à la fin du XVIIe siècle. Il s’agit d’un poème minimaliste composé – dans sa forme classique à l’occidentale – de trois fragments impairs selon le rythme court-long-court de 5/7/5 syllabes, soit 17 syllabes, avec un kigo (mot de saison) permettant de l’ancrer dans le temps et dans l’espace, et un kireji (césure) marquant un silence pendant la lecture, et ainsi, accentuant la dualité et/ou le dualisme entre les sujets ou images du texte.
De nos jours, dans un monde contemporain et multiculturel et dans un contexte cosmopolite et polymorphe, si le haïku moderne peut s’affranchir des contraintes de règles et de formes d’antan pour être encore plus bref, plus incisif, il doit néanmoins conserver, tout comme son aîné, sa sobriété, son éphémérité, son autoporteur, et surtout, son expression d’émerveillement ou moment-aha, qui représente sa principale raison d’être et qui fait de lui un poème si typique et original.
A titre d'illustration, considérons l'un des plus célèbres haïkus japonais :
i. Aperçu structurel :
ii. Scénario-type du haïku 'classique' :
iii. Concepts 'canoniques' selon Bashô :
Voici ci-dessous quelques règles pratiques, mais non-strictes, arbitrairement énumérées dans l'ordre de priorité tel que j'appréhende, et ce... dans une dimension non parfaitement définie (!) :
Le photo-haïku – shashin haïku – est un art récent – d’une certaine façon, une version contemporaine de haiga (peinture-haïku) – qui consiste à combiner et juxtaposer un haïku et une photo, ou toute autre œuvre visuelle, établissant ainsi un dialogue et un jeu de non-réponses entre ces deux formes d'art. Cette nouvelle expression poétique met ainsi en exergue la dimension, l’interactivité et la complémentarité entre l’art du haïku et celui de la photographie, sans pour autant que la photo soit une simple illustration du haïku en question, ou inversement, que le haïku serve de légende à la photo associée. Chaque support doit être autosuffisant, et donc, pouvoir exister séparément l’un de l’autre, et une fois ensemble, ils doivent pouvoir se réinventer et unir leurs atouts pour passer de l’esthétique visuelle à la profondeur textuelle, et ainsi, procurer l’instant de sensation et d’émotion.
Le tanka, forme poétique bien antérieure à celle du haïku (l'an 780 ?!), est composé – dans sa versification académique à l'occidentale – de cinq fragments alternés de 5/7/5 et 7/7 syllabes, soit en tout 31 syllabes regroupées en deux parties : la première – tercet de 17 syllabes – s'apparente au haïku, et la seconde – distique de 14 syllabes – vient renforcer et intensifier la première, une réplique en quelque sorte. Cependant, chacune des deux parties constitue un poème à part entière, et il arrive parfois que l'ordre entre le tercet et le distique soit inversé. Dans la construction du segment distique, tout est possible, tout est permis ; celui-ci peut ainsi adopter une approche factuelle et rationnelle comme le haïku, ou au contraire, subjective et empirique, voire métaphorique, sentimentale ou philosophique.
Et ci-après, la version anglaise sous la forme d'un tanka-bun, expression littéraire mêlant prose et tanka ; ce concept, dérivé du haïbun, n'est pas détaillé ici...
And there, at the other end of that starry sky, after a hard day's work, lying on a palace bed in a suit and tie, he is still dealing with life of a human being and it suddenly reminds him of the little boy ... I was!
Minh-Triêt Pham
Le renku est issu du renga ; ce dernier était, comme le tanka, l’un des arts littéraires les plus nobles du Japon féodal et se caractérise par une impressionnante liste de contraintes dans la composition par un groupe de poètes participants. Ainsi le renku, tel son grand frère le renga, est un long poème, ou plutôt, une expression poétique, dit lié ; il est traditionnellement constitué d’un enchaînement de strophes de forme de tanka, i.e. 5/7/5 syllabes (tercet) puis 7/7 syllabes (distique). Aussi est-il composé par plusieurs auteurs, lesquels écrivent chacun alternativement une strophe de 17 et de 14 syllabes, autrement dit, chaque tanka du renku est écrit à deux mains.
Non linéaire et dissymétrique dans sa construction, le renku aborde des thèmes plus populaires et avec plus de liberté dans les règles que celles élaborées par le renga. Son originalité et son intérêt résident dans l’enchaînement des séquences : chaque strophe est censée de répondre à la strophe antérieure, d’une manière plus ou moins empirique, ou au contraire, factuelle et rationnelle, moyennant les différents types de relations : juxtaposition (rouge / noir), opposition (ombre / lumière), renforcement (ruines / poussières), association (noir / tristesse), parallélisme (voyage / photo), etc. ou parfois, des jeux de mots.
L’art du renku pourrait être comparé à une partie d’échecs où chaque coup est dépendant du précédent et n’est en aucun cas le fruit du hasard ! Le renku de mes ouvrages, en collaboration avec la haïjin Christiane Haen-Ranieri, se veut de style sobre et contemporain, plus axé sur le fond que la forme et est dépourvu de contraintes si ce n’est que celle de l’enchaînement rigoureux et cohérent des strophes au fil des événements.